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06 janvier 2009

Investiture : hommage sera rendu aux combattants noirs de la guerre de Sécession

Des descendants de membres du fameux bataillon d'infanterie du Massachusetts prendront part au défilé d'investiture de M. Obama.

 
Le Monument aux combattants afro-américains de la Guerre de sécession à Washington
Le Monument aux combattants afro-américains de la Guerre de sécession à Washington rend hommage aux 209.145 noirs qui se sont battus.

Washington - « L'esclave se battra-t-il ? », avait demandé l'abolitionniste Wendell Phillips en 1863, au plus vif de la guerre de Sécession en Amérique. « Répondez non à quiconque vous pose cette question… mais répondez OUI quand on vous demande si un Nègre se battra ».

À cette époque, le 54e bataillon de fantassins volontaires du Massachusetts, composé entièrement de soldats noirs encadrés par des officiers blancs, venait tout juste d'être formé. Il devait par ses actions démontrer la véracité des propos de Wendell Phillips et inspirer les Noirs à s'enrôler toujours plus nombreux dans les forces armées américaines.

Cent quarante-cinq ans plus tard, une compagnie composée en partie de descendants de soldats de ce premier bataillon prendra part au défilé d'investiture du président Barack Obama, le 20 janvier - « le plus grand honneur qui m'ait jamais été octroyé », déclarait Benny White, qui représentera un lieutenant de « la compagnie A » du 54e bataillon.

M. White, qui est âgé de 64 ans, a grandi à Boston et, malgré l'intérêt qu'il avait toujours porté à la guerre de Sécession, il n'était devenu conscient du rôle historique du 54e bataillon qu'en 1989, quand il a vu le film Glory (Gloire) qui portait sur les fantassins volontaires du Massachusetts. C'était alors qu'il avait décidé de se joindre à d'autres citoyens de sa région du nord-est des États-Unis, la Nouvelle-Angleterre, pour former la « Compagnie A », l'objectif étant de participer à des reconstitutions d'événements historiques.

Les 600 membres du 54e bataillon n'avaient pas été les premiers Noirs à se battre pour les États-Unis, mais ils avaient été la première unité à recevoir le même entraînement militaire que les Blancs. Leur courage et leur compétence leur avaient valu des éloges au nom de tous les soldats afro-américains, notamment après qu'ils eurent dirigé l'offensive contre le fort Wagner, près de Charleston, en Caroline du Sud - opération au cours de laquelle près de la moitié de leurs effectifs avaient été tués ou blessés.

Moins bien payés que leurs camarades blancs, les soldats noirs avaient marché au combat, malgré le décret du gouvernement des États confédérés déclarant qu'ils seraient exécutés, de même que les officiers blancs à leur tête, même s'ils se rendaient.

Une reconnaissance tardive

« Quand j'étais plus jeune, lors d'excursions scolaires je passais près du monument au 54e bataillon érigé à Boston, et personne ne m'a jamais vraiment expliqué de qui il s'agissait », a dit M. White à America.gov.

Ses recherches, a-t-il ajouté, indiquent qu'à la fin de la guerre, en 1865, cette unité n'avait pas été autorisée à prendre part au défilé de victoire à Washington ; et la participation à la guerre de ses anciens membres - qui vivaient pour la plupart dans un bidonville près du siège du Congrès de l'État de Massachusetts, au quartier Beacon Hill de Boston - avait d'abord été passée sous silence.

Une scène du film <i>Glory</i> (1989).
Le film Glory (1989) a sensibilisé le public américain sur l'histoire les fantassins volontaires du Massachusetts.

La construction du monument de Boston a commencé en 1884 ; quatre décennies après avoir pris part à l'assaut contre le fort Wagner, le sergent William Harvey Carney devait devenir le premier Noir américain à recevoir la Médaille d'honneur.

En 1999, s'est achevée, à Washington, la construction d'un monument à la mémoire des Afro-Américains de la guerre de Sécession qui rend hommage non pas seulement au 54e bataillon, mais à tous les 209.145 soldats noirs qui se sont battus dans les rangs des forces de l'Union pendant ce conflit.

Bien que le film Glory ait aidé à attirer l'attention sur cette unité militaire et le rôle des soldats noirs américains pendant la guerre de Sécession, M. White se dit sceptique quant à certains éléments de ce long métrage, notamment les scènes montrant que les Noirs n'avaient pas droit à des uniformes et à des mousquets, et qu'ils étaient traités différemment de leurs camarades blancs.

En 1863, le gouverneur John Andrew du Massachusetts « était très strict dans ses instructions sur le traitement des soldats noirs et il souhaitait qu'ils soient traités exactement de la même manière que les soldats blancs », a dit M. White. « C'est pourquoi ils allaient dans les camps d'entraînement et les casernes comme tous les autres. On leur fournissait des uniformes et des armes et ils étaient formés tout comme les soldats blancs ».

Cependant, leur solde était inférieure. M. White a dit qu'en moyenne, un soldat recevait 13 dollars par mois, dont 3 dollars étaient déduits en échange de l'uniforme. Les législateurs du Massachusetts « voulaient traiter les soldats noirs comme des voituriers qui ne participeraient pas aux combats. Alors ils déduisaient 3 dollars supplémentaires… et leur offraient 7 dollars seulement par mois. »

Pendant 18 mois, et jusqu'à ce que cette controverse eût été réglée au Congrès des États-Unis, les soldats et un grand nombre de leurs officiers blancs avaient refusé d'accepter toute solde, un fait représenté dans le film. M. White a dit que vers la fin de la guerre, trois Afro-Américains avaient été promus au grade d'officier.

Un défilé pas comme les autres

Racontant sa visite au fort Wagner, M. White a dit que la région a beaucoup changé depuis 1863 : certaines parties du champ de bataille et du fort, le long des côtes, ont été érodées par l'océan, mais leur signification demeure.

« Pour moi, c'est vraiment quelque chose de me tenir, ici, à l'endroit même où les soldats se sont battus », a dit M. White. « Nous avons passé environ deux heures à marcher sur les mêmes dunes de sable où ces soldats ont pris part aux combats. »

En pensant aux cérémonies qui marqueront, le 20 janvier, l'investiture du premier président afro-américain des États-Unis, M. White dit qu'il essaie de se convaincre lui-même qu'il s'agit « d'un défilé comme les autres », rien que pour tenter de garder un air de dignité quand il dirigera sa compagnie.

« Mais bien sûr, pour moi, il s'agit de beaucoup plus que ça », dit-il. « J'ai participé à toutes sortes de défilés depuis que j'avais peut-être 15 ans, mais cela sera le plus grand honneur que j'aurais jamais eu. »

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