06 février 2008

Sans profits, l'innovation ne mène nulle part dans le monde des affaires

Engagement, investissement et temps sont indispensables à l'innovation.

 
Steve Jobs
Le co-fondateur de Apple Computer dévoile le iPod Shuffle le 12 septembre 2006 à San Francisco. (© AP Images)

Washington - Les entreprises doivent constamment remettre en question leur savoir et leur expérience pour encourager l'innovation et elles doivent gérer cette innovation de manière rigoureuse pour dégager des bénéfices, avancent les experts.

Selon une enquête annuelle menée à l'international par le Boston Consulting Group (BCG) et le magazine Business Week auprès de dirigeants, la plupart des grandes entreprises sont créatives et certaines sont très inventives. Moins de 20 % des personnes interrogées ont admis qu'elles n'avaient pas de grandes idées.

C'est une bonne nouvelle parce que l'innovation peut aider les entreprises à acquérir de nouvelles connaissances, améliorer leur image de marque et stimuler le moral de leurs employés. Mais, avancent James Andrew et Harold Sirkin du BCG dans leur livre Payback : Reaping the Rewards of Innovation (Récompense : comment tirer profit de l'innovation), à moins que les idées créatrices et les inventions ne dégagent des bénéfices, l'innovation est une affaire perdante pour la plupart des entreprises.

Seules les entreprises qui sont capables de transformer leurs idées en chiffre de vente et en bénéfices peuvent vraiment être appelées novatrices, a confié M. Andrew au Service d'information du département d'État. Les actionnaires de ces entreprises s'en tirent mieux que les autres parce que les actions des entreprises les plus novatrices sont plus performantes que celles des autres.

Cependant, plus de la moitié des personnes interrogées lors de l'enquête de 2007 ont déclaré qu'elles n'étaient pas satisfaites de la rentabilité des investissements dans les innovations, « ce qui signifie que [les entreprises] ont des idées mais qu'elles ne savent pas les rentabiliser », explique M. Andrew.

Il ajoute que la plupart des entreprises sont bien disposées envers l'innovation. Dans l'enquête, deux tiers des personnes interrogées ont répondu que l'innovation était une de leurs trois priorités stratégiques et les deux tiers d'entre elles ont déclaré qu'elles allaient augmenter les dépenses consacrées à l'innovation en 2007 par rapport à 2006.

Culture d'entreprise et prise de risques

Les entreprises les plus novatrices - Apple, Google, Toyota, General Electric (GE) et Microsoft, qui ont été classées 5 premières en 2007 par les personnes ayant répondu à l'enquête - partagent certaines caractéristiques. Elles encouragent la prise de risque et elles acceptent, pèsent et gèrent ce risque. Elles ont des dirigeants adeptes de l'innovation et elles sont prêtes à l'appuyer de leurs ressources.

Mais les entreprises les plus novatrices n'hésitent pas à saborder les idées ayant peu de chances de dégager des bénéfices financiers et elles retirent leur soutien aux processus, technologies et produits qui ont fait leur temps.

Selon M. Andrew, quelquefois, la direction croit en l'innovation mais elle ne sait pas comment changer la culture de l'entreprise pour la nourrir et faire que les employés la soutiennent.

Toujours selon M. Andrew, certaines entreprises ne profitent pas des innovations parce que leurs stratégies d'innovation ne sont pas alignées sur leurs stratégies commerciales, ou parce que le processus d'innovation est isolé, fragmenté ou disjoint, ou encore parce que les initiatives lancées sur la base d'innovations précédentes monopolisent les ressources ou enfin parce que les prescriptions de progrès quantifiables vont à l'encontre de l'objectif de l'innovation.

Une autre experte, Cynthia Barton Rabe, ex-stratégiste de l'innovation pour Intel, rappelle que les connaissances et l'expérience - les deux pierres de touche de la réussite de toute entreprise - inhibent l'innovation lorsqu'elles freinent les nouvelles approches. Dans son livre The Innovation Killer (Ce qui tue l'innovation), elle avance que la tendance des membres d'une équipe à arriver à une décision unanime - même si ce n'est pas la meilleure - ou de prendre des décisions fondées uniquement sur l'avis ou le savoir des dirigeants ne fait qu'aggraver le problème.

Pour briser le moule des mentalités acquises et libérer le flux de l'esprit novateur, elle suggère de faire venir des experts de l'extérieur qui ne seront pas tenus par l'expertise, la réglementation et les manières de travailler d'une équipe. Ils devront maintenir une certaine distance psychologique par rapport à l'équipe et avoir une certaine expertise au regard du projet mais surtout être des généralistes.

Surveiller la trésorerie

M. Andrew rappelle qu'il n'existe pas de moyen sûr de sélectionner les idées qui dégageront, à terme, le plus de bénéfices. Pour commencer, les entreprises doivent donc accepter d'étudier un grand nombre d'idées et les considérer comme un portefeuille de possibilités assorties de risques et d'avantages différents. Elles doivent aussi mettre en place un processus rigoureux et rationnel pour faire avancer rapidement les plus prometteuses et éliminer les autres rapidement et au moindre coût possible.

M. Andrew déclare que les entreprises peuvent gérer ce processus et mesurer les progrès accomplis par la biais d'une courbe de trésorerie - graphique prenant en compte les investissements avant lancement, la rapidité du processus de développement de l'innovation, de sa commercialisation et de sa mise sur le marché, le temps de montée en puissance de la production et les coûts annexes, par exemple de commercialisation et de service.

Apple a montré avec son iPod qu'il est possible de bien gérer l'innovation. La société n'a pas seulement réduit ses coûts de développement en sous-traitant le travail d'ingénierie mais elle a su accélérer rapidement son rythme de production lorsque le iPod a « pris » sur le marché.

D'une manière générale, les entreprises ne doivent pas passer trop de temps à élaborer, développer et commercialiser une idée parce que le processus peut devenir trop coûteux et l'idée dépassée. Par exemple, Motorola et ses partenaires ont consacré tellement de temps et de ressources à transformer le concept de téléphone satellitaire appelé Iridium en un produit commercialisable que ses clients potentiels ont cédé aux charmes des entreprises de téléphonie mobile et que le projet a fait faillite.

(Les articles du "Washington File" sont diffusés par le Bureau des programmes d'information internationale du département d'Etat. Site Internet : http://usinfo.state.gov/francais/)

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