15 février 2006

August Wilson, grand dramaturge afro-américain

La célébration du Mois de l'histoire afro-américaine

 

Washington - Dans les instructions qu'il a rédigées pour la production de sa dernière œuvre « Radio Golf », le dramaturge américain August Wilson décrit le rire aux éclats d'un de ses personnages comme celui d'un homme qui saigne et qui ne sait pas qu'il est blessé. « C'est, dit-il, le rire d'un homme qui a rompu ses liens et qui est vraiment libre. » Cette description pourrait bien s'appliquer à lui.

August Wilson est mort des suites d'un cancer du foie le 2 octobre 2005, moins de deux mois après avoir annoncé publiquement sa maladie.

« Ce n'est pas comme une partie de poker. On ne peut pas s'attendre à obtenir de meilleures cartes », a-t-il déclaré au quotidien de sa ville natale « The Pittsburgh Post-Gazette » à la fin de l'été 2005. « J'ai eu une vie riche. Je suis prêt. »

Le mois de février avant sa mort, il avait participé à de nombreuses manifestations culturelles dans le cadre du Mois de l'histoire afro-américaine.

Quels que soient les critères utilisés, August Wilson fait partie des grands dramaturges américains, tels qu'Eugene O'Neill, Tennessee Williams, Arthur Miller et Edward Albee.

Il a réalisé quelque chose que seul Eugene O'Neill avait tenté, et sa réussite a été bien plus grande. Au début du XXe siècle, le dramaturge américain d'origine irlandaise a écrit quatre pièces qui, de l'avis général, sont liées les unes aux autres. August Wilson a écrit, lui, dix pièces qui dépeignent la vie des Noirs aux États-Unis sur une période de cent ans, l'action de chaque pièce se déroulant pendant une décennie différente.

« Radio Golf », qui se passe pendant les années quatre-vingt-dix et qui a déjà été représentée dans trois États, est la dernière de ses dix pièces.

August Wilson a déclaré que ses pièces portaient sur l'amour, l'honneur, le devoir, la trahison, « toutes choses que des êtres humains ont dépeintes depuis le début des temps ». Son but, a-t-il dit, était de « prendre la culture, de la mettre sur scène et de montrer qu'elle peut soutenir quiconque ». Il était l'universaliste par excellence.

Le thème du Mois de l'histoire afro-américaine de cette année est « La célébration de la communauté », ce qui est exactement ce qu'August Wilson a fait dans ces pièces en décrivant des personnages vivant dans le quartier noir et pauvre de son enfance, dans le « Hill district » de Pittsburgh, sa vie natale.

À l'exception d'une pièce dont l'action se déroule à Chicago en 1927, à l'âge d'or du jazz, toutes les autres se passent dans ce quartier de Pittsburgh. Les personnages vont et viennent, et certains réapparaissent. Les divers événements de l'histoire du pays servent de toile de fond, et les bouleversements qui ont eu lieu dans le monde sont décrits avec passion et d'une manière poignante. Deux de ses pièces ont reçu le prix Pulitzer.

August Wilson est né en avril 1945, d'un père blanc et d'une mère noire. Il arrête ses études secondaires à l'âge de quinze ans, mais continue de lire beaucoup à la bibliothèque publique de son quartier. Il commence d'écrire des poèmes durant son adolescence. Après avoir fait partie d'une troupe de théâtre locale et travaillé dans une galerie d'art, il s'intéresse à la dramaturgie, puis y renonce pendant de nombreuses années. À la fin des années 1970, il trouve un emploi au musée des sciences de la ville de Saint-Paul au Minnesota, qui lui demande d'adapter des contes populaires amérindiens de manière à les transformer en pièces de théâtre pour enfants. C'est là le début de sa vie de dramaturge.

Sa première pièce, « Ma Rainey's Black Bottom », dépeint une chanteuse noire de blues des années 1920 et montre les épreuves qu'elle subit à une époque empreinte de racisme. Sa deuxième pièce, « Fences », décrit la société américaine à la fin des années 1950, à une période où des changements ont lieu dans le pays, mais pas pour tous. Alors qu'August Wilson va et vient dans le temps, il garde toujours un œil fixé sur l'évolution qui s'est produite ou qui n'a pas eu lieu.

Certaines de ces pièces ont un champ limité et porte sur des personnages aux abois au sein d'une famille ou d'une collectivité. D'autres ont un champ bien plus vaste, comme sa neuvième pièce, « Gem of the Ocean », qui se passe en 1904 et qui mêle mythe et réalisme magique au cours d'une période de plusieurs siècles. Quant à la pièce, « The Piano Lesson », elle décrit dans les années 1930 un frère et une sœur qui se disputent un bien de famille : un piano.

Les pièces d'August Wilson ont été interprétées par des acteurs exceptionnels, dont certains sont réputés, notamment James Earl Jones et Angela Bassett, et d'autres moins connus et plus jeunes, tels Charles S. Dutton et Viola Davis.

Il y a quelques années, James Earl Jones a écrit : « Il est difficile à un acteur de se tromper s'il est fidèle aux paroles qu'August Wilson a écrites (...) Ses phrases sont si bien construites. August était un poète avant de devenir dramaturge, et la poésie fait partie de la langue que parlent ses personnages. »

Poète et dramaturge, créateur de personnages mémorables et de tapisseries envoûtantes, August Wilson était essentiellement un chroniqueur de son temps. Il a présenté les annales de la vie américaine tel qu'il les a observées à travers les yeux des habitants de son quartier.

« Mes pièces, a-t-il dit, insistent sur le fait que nous ne devons jamais oublier notre histoire ou la rejeter. »

(Les articles du "Washington File" sont diffusés par le Bureau des programmes d'information internationale du département d'Etat. Site Internet : http://usinfo.state.gov/francais/)

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