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10 juin 2008

De jeunes artistes handicapés brillent au Centre Kennedy

Venus de Jordanie, du Sénégal et des États-Unis, ils offrent chacun un style différent.

 
Issam Ibrahim Elayyan
Issam Ibrahim Elayyan, un joueur d'oud malvoyant de la Jordanie, le 29 mai au centre Kennedy à Washington. (Photo VSA Arts)

Washington - Huit jeunes artistes des États-Unis, de Jordanie et du Sénégal se sont produits, le 29 mai, au Centre John Kennedy pour les arts du spectacle en qualité de lauréats d'un prix qui récompense de jeunes musiciens handicapés pour leur excellence.

Ce VSA art International Young Soloists Award (Prix international VSA du jeune soliste) est décerné par VSA arts, une organisation sans but lucratif qui œuvre à rendre les arts accessibles à tous, y compris aux handicapés.

Ont participé au concert du 29 mai un groupe hip-hop de Dakar (Sénégal), un joueur d'oud d'Amman (Jordanie), une pianiste classique du Montana et un ensemble vocal de l'Arizona. Ils ont été récompensés non seulement pour leur talent, mais aussi pour avoir surmonté des obstacles auxquels se heurtent rarement la plupart des gens.

Du hip-hop façon africaine

Avec une musique qui associe rythme hip-hop et éléments traditionnels africains, le groupe Avocat Rap Bi ne cesse de séduire les foules depuis sa formation, en 1999. Ses membres - Mandaw Gning, 27 ans, atteint de la polio, Idrissa Fall, 21 ans et Mbéné Amare, 22 ans, ont accordé un entretien au journaliste d'America.gov par le truchement d'interprètes. Ils ont expliqué que c'était le fait d'écouter du rap qui les avait amenés au hip-hop. Ils ont ensuite rapidement commencé à composer leur propre musique et à écrire leurs propres paroles, incorporant des rythmes africains au format hip-hop.

Parce que leur prestation est avant tout vocale, ils se produisent sur un fond musical préenregistré. MM. Gning, Fall et Amare ont expliqué que les rappeurs américains Tupac Shakur, 50 Cent et Ja Rule avaient été leur principale influence musicale, ainsi que des groupes sénégalais tels que Positive Black Soul et Daradj.

« Nous composons notre propre musique », a dit M. Amare. « Nous écrivons nos paroles, nous travaillons tous ensemble. » Ils incluent parfois des chansons d'autres artistes à leur répertoire. « Nous rêvons de faire un CD », a dit M. Gning. « Nous espérons partir en tournée dans le monde entier. » Ils ont acquis une telle popularité au Sénégal que de grandes sociétés telles que Nescafé, Coca Cola et Marlboro ont parrainé nombre de leurs concerts.

Si la musique d'Avocat Rap Bi est dynamique et enjouée, elle n'est pas dénuée d'un côté plus sérieux. « Nous encourageons les jeunes Africains à ne pas risquer leur vie en recourant à des moyens dangereux pour quitter l'Afrique à la recherche d'un emploi. Nous voulons que la jeunesse du continent reste en Afrique et s'y investisse. Si nous arrivons à gagner de l'argent en faisant ce que nous aimons, nous pourrons montrer aux jeunes Africains qu'il est possible d'avoir un avenir dans leur pays natal. »

Le fait de se produire au Centre Kennedy représente pour ce groupe un grand pas vers l'étendue de leur renommée. S'il arrive à organiser une tournée à l'étranger et à vendre ses enregistrements, a dit M. Gning, « nous saurons que notre message est transmis dans le monde entier ».

L'espoir d'inspirer les autres

Issam Ibrahim Elayyan, un joueur d'oud de 21 ans qui a commencé à perdre la vue à sept ans, est sur le point de recevoir sa licence du Conservatoire national de musique de Jordanie. Il a commencé à étudier l'oud - un instrument arabe qui ressemble au luth - il y a seulement quelques années. « J'avais 18 ans quand j'ai commencé à étudier l'oud, et je l'ai fait à la demande de mon père. » Il étudie également le violon.

Les <i>MacIntyre Family Singers</i>
Les MacIntyre Family Singers : Scott et Katelyn, tous deux aveugles de naissance, et Todd. (Photo VSA Arts)

Spécialiste de la musique classique arabe et membre du Quartette de musique arabe d'Amman, M. Elayyan s'est produit dans divers festivals et concerts dans le monde entier, notamment en France, à Chypre, en Égypte et au Bahreïn. Il a prévu des concerts en Italie et à Chypre en juillet. Ensuite, il a l'intention de faire sa maîtrise.

Il a hâte de partager son héritage culturel avec son public, et il aime particulièrement jouer de l'oud pour d'autres handicapés. « C'est génial. J'espère que ça les encourage à poursuivre leurs propres objectifs. »

Redorer le blason de la musique classique

Ashlee Young, une étudiante de 20 ans à la State University-Billings du Montana, a commencé à jouer du piano à l'âge de 4 ans. Si les exercices n'étaient pas toujours une priorité durant son enfance, son don était si évident qu'elle s'est mise à consacrer de plus en plus de temps à cet instrument. « J'ai commencé à participer à des concours à 12 ans », a-t-elle dit, déclarant qu'elle avait commencé à envisager sérieusement une carrière musicale à l'école secondaire.

Depuis, Mlle Young, qui souffre de scoliose et de dépression, joue régulièrement en public. En 2007, elle a remporté le concours de l'Association des orchestres symphoniques du Montana, et elle a joué avec l'orchestre symphonique de Great Falls, figurant à la même affiche que la célèbre violoniste Midori. Si elle préfère se produire en soliste, elle se réjouit à la perspective d'autres collaborations. « J'espérais pouvoir travailler avec le regretté ténor Luciano Pavarotti. J'ai toujours bon espoir de le faire avec Martha Argerich », une artiste argentine considérée comme l'une des plus grandes pianistes de notre époque.

Mlle Young a affirmé que ses compositeurs favoris étaient Franz Liszt, Joseph Haydn et Olivier Messiaen, un compositeur, organiste et professeur français du XXe siècle célèbre pour son utilisation de thèmes mystiques et religieux.

Son objectif, a-t-elle dit, est d'obtenir une « réaction émotive » de son auditoire lorsqu'elle joue, afin de changer la façon dont la musique classique est souvent perçue, à savoir lourde et ennuyeuse. « J'aime sentir les gens s'enthousiasmer. J'aimerais leur faire comprendre que la musique classique n'est pas réservée à quelques vieux messieurs », mais qu'elle est au contraire constamment revitalisée par de jeunes artistes et compositeurs qui ne cessent de soutenir, de défier et de réinterpréter les classiques.

Des entités distinctes réunies

Les MacIntyre Family Singers - Scott (22 ans) et Katelyn (17 ans), tous deux aveugles de naissance, et Todd, 19 ans, qui voit, sont des chanteurs chevronnés qui se produisent en trio ou en solo. Ils ont commencé à prendre des leçons de piano et de chant avant d'atteindre l'adolescence.

« Pour moi, rien n'a remplacé le piano », a dit Scott, qui a commencé par la musique classique. Lorsqu'il chante en solo, il s'accompagne au piano, et il occupe la même fonction dans le MacIntyre Family Singers. Scott et Todd ont un registre vocal remarquablement étendu, (ils peuvent chanter des partitions écrites pour des ténors aussi bien que pour des barytons et des basses, ce qui est rare dans les milieux musicaux).

Quant à leur sœur, la soprano Katelyn, son genre préféré est l'opéra. « Je fais aussi un peu de théâtre musical, et ce qui pourrait être décrit comme un mélange de musique classique et de pop. » Elle a cité Georg Friedrich Haendel comme son compositeur préféré.

Les MacIntyre envisagent bientôt un concert au Japon, et Todd va commercialiser son premier CD classique à la fin août. À la question de savoir ce qu'ils aimaient transmettre à leur public, Katelyn a répondu : « Je veux montrer à quel point j'aime chanter. J'espère que nous toucherons les gens, qu'ils seront en mesure de ressentir notre expérience vécue. »

Étant donné qu'il s'agit d'un concert parrainé par VSA, a dit Todd, « j'espère que les gens vont apprécier ce que Scott et Katelyn ont dû surmonter » pour développer leur art.

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