Élections 2008 | Le peuple américain choisit ses dirigeants

16 janvier 2009

M. Obama fermera la prison de Guantanamo et rejette le recours à la torture

Les propos du ministre désigné de la justice Eric Holder lors de son audition devant le Sénat

 
La prison de Guantanamo (Cuba).
Le gouvernement Obama a déclaré son intention de fermer la prison de Guantanamo (Cuba).

Washington - Le prochain gouvernement des États-Unis fermera les installations de détention de la baie de Guantanamo à Cuba, et les techniques qui seront employées par les autorités américaines pour interroger des personnes soupçonnées de terrorisme se conformeront aux dispositions des traités signés par les États-Unis ainsi qu'aux conventions de Genève.

C'est ce qu'a affirmé, le 15 janvier, M. Eric Holder, désigné par le président élu Barack Obama le 1er décembre 2008 au poste de ministre de la justice, lors de son audition devant la commission judiciaire du Sénat.

« Guantanamo sera fermé », a-t-il déclaré. « Des mesures ont d'ores et déjà été prises (...) en vue d'examiner la façon dont cela va se faire. »

Lors de l'audition, des membres de la commission ont demandé à M. Holder de donner son avis sur la pratique de simulation de noyade dite du « waterboarding », technique d'interrogation qui donne à la personne interrogée l'impression qu'elle se noie et qui a été utilisée par les États-Unis lors de l'interrogation de suspects, fait qu'a reconnu le gouvernement Bush.

« Le waterboarding est une forme de torture » qui viole les conventions de Genève, a déclaré M. Holder. Le gouvernement Obama « a l'intention de s'assurer que nous emploierons des techniques d'interrogation qui satisfont à notre conception des valeurs américaines, afin que nous ne fassions rien qui puisse servir de motif de recrutement à des gens qui sont nos ennemis. Certaines des ces techniques plus avancées ne produisent pas nécessairement de bons résultats sur le plan du renseignement. »

Le président élu Barack Obama a affirmé, le 11 janvier, que la pratique de la torture n'existerait pas dans son gouvernement. Dans un entretien accordé à l'émission This Week, de la chaîne de télévision ABC, M. Obama a rappelé qu'au cours de sa campagne électorale, il avait convenu avec son rival républicain John McCain du fait que les États-Unis pouvaient assurer leur sécurité « tout en demeurant fidèles à leurs valeurs et idéaux fondamentaux ».

En ce qui concerne les installations de détention de la baie de Guantanamo à Cuba, M. Obama a dit qu'il serait difficile de les fermer au cours des 100 premiers jours de son mandat. Il a souligné que son gouvernement s'acquitterait de l'engagement pris de respecter la primauté du droit, ajoutant cependant : « Cela ne se fera pas de manière à remettre en liberté des personnes dont l'objectif est de nous faire sauter. »

Le centre de détention de Guantanamo a été établi par l'armée américaine pour emprisonner des combattants ne portant aucun uniforme, menant une lutte indépendante, sans appartenir à une armée nationale quelconque, et qui avaient été capturés pendant qu'ils prenaient part à des combats ou à des activités terroristes en Afghanistan et dans d'autres pays. Ces combattants constituent un problème juridique épineux pour les États-Unis.

Dans son audition au Sénat, M. Holder a dit qu'afin de fermer, en toute responsabilité, ces installations, les États-Unis devaient « déterminer, de manière indépendante, qui étaient (ces détenus), en examinant tous les documents qui existent sur place, pour pouvoir les traiter de façon appropriée ».

Eric Holder
Le ministre de justice désigné, M. Eric Holder, a affirmé que la pratique de simulation de noyade est une forme de torture.

M. Holder a classé la plupart des détenus de Guantanamo en trois catégories : « ceux qui, à mon avis, nous pouvons rapatrier sans danger vers d'autres pays ; ceux que nous pouvons traduire en justice ; et (...) ceux qui, peut-être, sont trop dangereux mais qui, néanmoins, ne peuvent pas être traduits en justice ».

Quant à ceux qu'il serait possible de juger, M. Holder a dit que le gouvernement de M. Obama examinerait la possibilité de les traduire devant des tribunaux fédéraux de la manière prévue par l'article III de la Constitution des États-Unis ou devant des commissions militaires. Mais celles-ci, telles qu'elles fonctionnent actuellement, n'offrent pas de garanties suffisantes pour un processus équitable, a-t-il ajouté.

« Ce que je peux vous assurer, à vous et au peuple américain - et franchement, au monde entier - c'est que, quel que soit le système que nous utiliserons, il sera conforme à nos valeurs. Ce sera un système qui garantira une procédure équitable. Et il sera reconnu comme tel », a affirmé M. Holder.

Celui-ci a également dit que l'équipe de M. Obama n'avait pas encore déterminé ce qu'elle ferait des détenus considérés comme dangereux mais qui ne peuvent pas être jugés. Il a cependant souligné que le nouveau gouvernement « traiterait ces personnes de manière équitable, d'une manière, franchement, qu'elles-mêmes n'utiliseraient pas avec nous ».

« La façon dont nous résoudrons cette question, ce point particulier, révélera plus que toute autre chose, je pense, le caractère de notre nation », a déclaré M. Holder.

Il a également précisé qu'aucun prisonnier ne serait remis à un pays étranger « où il serait torturé, si les États-Unis soupçonnent, ou ont des raisons de croire, que cette possibilité existe ».

Le candidat désigné par M. Obama au poste de ministre de la justice a également fait observé que le combat que les États-Unis menaient contre des organisations terroristes échappait à la conception classique d'une guerre. « Les États-Unis n'auraient pas dû attendre jusqu'au 11 septembre 2001 pour arriver à cette conclusion », a-t-il ajouté.

Dans ce conflit, il y a des champs de bataille matériels, comme en Afghanistan ; il y a aussi les « cyber-champs de bataille » où les États-Unis doivent engager le fer, a-t-il dit. Mais il y a aussi la bataille pour l'opinion publique dans le monde islamique.

« Nous devons (...) nous comporter de manière à pouvoir remporter aussi cette bataille, pour que les gens là-bas, qui auraient de bonnes intentions, ne finissent pas par se ranger du mauvais côté et contre nous », a souligné M. Holder.

Reconnaissant qu'il s'agissait « d'une période difficile » pour les États-Unis, il a dit qu'il est facile d'adhérer aux principes quand tout marche bien, mais que l'épreuve véritable est d'y adhérer face aux défis.

« Quand nous sommes en guerre dans deux endroits du monde, quand nous avons des préoccupations budgétaires, ça, c'est l'épreuve véritable, (l'heure) pour l'Amérique (de prouver ses principes) », a précisé M. Holder.

« Sommes-nous vraiment tels que nous le disons ? Je crois que nous le sommes », a dit M. Holder aux sénateurs. « Et je crois que sous une direction éclairée, nous pourrons maîtriser et régler toutes ces questions que vous soulevez ».

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