Le gouvernement kenyan d’union nationale traverse un passage difficile,
fragilisé qu’il est par la hausse des tensions entre le président Mwai
Kibaki et son premier ministre Raila Odinga. Les deux leaders
politiques rivaux avaient accepté de former ce gouvernement d’union
nationale l’année dernière, après deux mois de violences politiques
consécutives aux élections controversées du 27 décembre 2007.
Il avait
fallu tout le doigté et la patience de l’ancien secrétaire général de
l’Onu Kofi Annan
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Le président Mwai Kibaki et le leader de l'opposition Raila Odinga signant l'accord de partage du pouvoir à Nairobi
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pour parvenir à un accord de paix entre le Parti
d’unité nationale de Mwai Kibaki et le Mouvement démocratique Orange de
Raila Odinga, qui contestait la victoire du parti présidentiel aux
élections. Un nouveau poste de Premier ministre avait été spécialement
créé pour M. Odinga. Mais ce dernier accuse maintenant le chef de
l’Etat de saper son autorité et de chercher à la marginaliser. Le
Mouvement démocratique Orange se plaint notamment de plusieurs
décisions unilatérales prises ces dernières semaines par le président
Kibaki et ses alliés politiques. Entre autres la formation d’une équipe
de transition pour succéder à la commission électorale discréditée,
abolie récemment. Plusieurs membres de l’ancien organisme y ont obtenu
des postes au grand scandale du parti d’opposition, qui rappelle le
rôle de détonateur des troubles postélectoraux joué par la commission.
Ces décisions unilatérales portent atteinte à la crédibilité du premier
ministre Odinga auprès du public, soulignent les partisans du mouvement
démocratique Orange.
Nombre de politologues kenyans se font l’écho de
cette analyse. C’est notamment le cas de Barack Muluka, qui est basé à
Nairobi. M. Muluka fait état de plusieurs initiatives controversées du
président Kibaki pour protéger son pouvoir politique. « Le président
Kibaki a décidé d’établir un bureau au sein du gouvernement, qui semble
agir en parallèle à celui du Premier ministre…..c’est le bureau du chef
de la fonction publique, qui, à maintes prises, a pris des initiatives
favorables au président », affirme Barack Muluka. Francis Muthaura,
titulaire du poste en question, est un proche du chef de l’Etat. Et
c’est justement lui qui a nommé les personnalités contestées par le
Mouvement démocratique Orange au sein de l’équipe de transition ayant
succédé à la commission électorale nationale. D’où la colère des
partisans de Raila Odinga.
Les leaders du parti d’opposition sont
actuellement réunis en conclave pour étudier leurs possibles options.
Ils se disent déterminés à stopper l’érosion des pouvoirs accordés du
Premier ministre, mais ils soulignent aussi leur intention de ne pas
se retirer du gouvernement de coalition, ni d’en réclamer la
dissolution. Des déclarations d’intention qui ne rassurent pas
complètement les analystes. Ces derniers craignent en effet que la
reprise des querelles politiques à la tête de l’Etat n’entraine un
regain de violence et d’instabilité au Kenya.