eJournal USA: Perspectives économiques

L'amélioration de la santé maternelle

Donna Vivio et Barbara Kinzie

Les objectifs internationaux de développement : les progrès réalisés

Sommaire
Avant-propos
Favoriser la croissance économique à l'aide d'une politique judicieuse en matière de développement
Les dimensions du développement
L'Alliance pour le développement mondial
Lutter contre la pauvreté d'une façon rentable
L'Initiative en faveur de l'enseignement en Afrique
Le traitement du paludisme chez les enfants dans les zones rurales du Rwanda
L'amélioration de la santé maternelle
La lutte contre la pandémie de sida
L'autonomisation des femmes : un sage investissement
La protection des ressources naturelles de la Namibie
Bibliographie
Sites Internet
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Chaque jour, environ 14.000 femmes et jeunes filles, dont 99 % habitent dans des pays en développement, meurent des complications de la grossesse ou de l'accouchement. L'organisme JHPIEGO œuvre en faveur de la santé maternelle et néonatale dans un grand nombre de pays, notamment en formant des accoucheurs qualifiés, qui peuvent être des sages-femmes, des infirmières ou des médecins spécialisés dans la prise en charge des grossesses et des accouchements sans complications. À partir d'exemples tirés de l'action du JHPIEGO en Afghanistan, au Népal, en Indonésie et au Burkina-Faso, les auteurs décrivent le rôle des accoucheurs qualifiés qui s'occupent des femmes, même dans les régions les plus reculées et les plus mal desservies sur le plan médical.

Mme Donna Vivio est directrice du centre de santé maternelle et infantile du JHPIEGO, institution affiliée à l'université Johns Hopkins. Mme Barbara Kinzie en est une conseillère principale.

Le programme Johns Hopkins pour l'enseignement de la gynécologie et de l'obstétrique à l'étranger, ou JHPIEGO, a été lancé il y a trente-trois ans. Sa mission, qui a évolué au fil du temps, dépasse aujourd'hui le seul cadre de la gynécologie et de l'obstétrique, et c'est sous le sigle JHPIEGO que ce programme est aujourd'hui connu dans le monde entier.

Une Guinéenne et sa petite fille.
Une Guinéenne et sa petite fille
Laura Lartigue, Agence des États-Unis pour le développement international

Chaque année, plus de 500.000 femmes et jeunes filles, soit 14.000 par jour, meurent des complications de la grossesse et de l'accouchement. Quatre-vingt-dix-neuf pour cent de ces décès surviennent dans les pays en développement.

L'Agence des États-Unis pour le développement international (USAID) est déterminée à améliorer la santé et les chances de survie des accouchées et des nouveau-nés dans le monde entier en investissant dans des programmes de santé maternelle et néonatale. C'est essentiellement à des organisations non gouvernementales qu'elle confie la responsabilité de veiller à ce que les femmes aient accès aux soins dont elles ont besoin pendant la grossesse et l'accouchement. Le JHPIEGO est une institution affiliée à l'université Johns Hopkins et l'un des organismes partenaires de l'USAID chargés de mettre en œuvre les programmes visant à faire reculer la mortalité et l'invalidité maternelles et infantiles.

Depuis 1998, le JHPIEGO œuvre en faveur de la santé maternelle et néonatale et de la survie des accouchées et des nouveau-nés dans un grand nombre de pays par l'intermédiaire de divers programmes d'envergure mondiale financés par l'USAID, tels le programme ACCESS (Accès aux services de santé cliniques et communautaires pour les femmes, les mères et les nourrissons) et son prédécesseur, le programme MNH de santé maternelle et néonatale, ou encore par le biais de programmes bilatéraux, notamment en Afghanistan, en Zambie et à Haïti.

L'une des principales contributions du JHPIEGO tient à la mise en place de programmes et de projets à l'appui de la formation d'accoucheurs qualifiés agréés : il s'agit de professionnels de la santé, par exemple des sages-femmes, des médecins ou des infirmières, qui ont reçu une formation théorique et pratique leur permettant de suivre les grossesses et les accouchements sans complications, d'assurer la prise en charge des femmes après l'accouchement, de s'occuper des complications susceptibles de survenir chez les accouchées et les nouveau-nés et de les orienter au besoin vers des services spécialisés.

La création du poste d'accoucheur qualifié

Le haut niveau d'éducation et de formation des accoucheurs qualifiés facilite l'acquisition de connaissances et de compétences pratiques d'importance vitale qui privilégient la solution de problèmes, la capacité de raisonnement et la prise de décisions plutôt que la simple mémorisation de faits. En outre, l'importance qu'il y a de respecter les femmes et leurs familles et de répondre à leurs besoins tient une place fondamentale.

On peut récapituler comme suit les composantes fondamentales d'un programme de nature à promouvoir les connaissances et les compétences de cette nature : cours et mécanismes de formation préalable et sur le tas axés sur les compétences attendues ; matériel didactique détaillé et conforme aux sensibilités locales ; participation d'enseignants et de formateurs qualifiés et capables de guider l'apprentissage de leurs étudiants en salle de classe, dans les centres médicaux et dans les villages et quartiers.

Au fil des ans, le JHPIEGO s'est employé dans plus de 25 pays à renforcer ou à mettre en place, le cas échéant, des programmes d'éducation préalable au profit d'infirmières, de sages-femmes et de médecins afin de donner à ceux-ci les moyens de sauver la vie de femmes. En Afghanistan, par exemple, le JHPIEGO a mis sur pied un programme de formation de sages-femmes.

En grande partie à cause de la pénurie de prestataires qualifiés, les complications liées à l'accouchement coûtent la vie à une Afghane toutes les 30 minutes ; c'est dire que ces complications sont plus meurtrières que la sous-alimentation et la guerre. En œuvrant dans le cadre du programme REACH de l'USAID relatif à l'élargissement en milieu rural des soins médicaux en Afghanistan, et de ses deux partenaires, à savoir les associations Management Sciences for Health et Save the Children, le JHPIEGO a élaboré un programme de cours sur deux ans qui comporte un volet théorique en salle de classe ainsi qu'une composante clinique dans les hôpitaux. À ce jour, des écoles de sages-femmes ont été établies à Herat, à Mazar As-Shariif, à Jalalabad, à Kandahar, à Kaboul, à Badakshan, à Bamiyan, à Jawzjan, à Khost et à Takhar, et deux promotions d'élèves en sont déjà sorties diplômées. De surcroît, 299 sages-femmes obtiendront leur diplôme en 2005, soit une augmentation de 64 % par rapport au nombre d'élèves formées au moment de la chute du gouvernement des talibans. Certaines de ces écoles sont des établissements d'enseignement rattachés à des hôpitaux en milieu urbain, mais 5 d'entre elles s'insèrent dans des programmes communautaires qui ont été créés pour faire en sorte que même les femmes habitant dans des régions reculées aient accès à des soins spécialisés. À la conclusion du programme REACH en mai 2006, 830 sages-femmes auront été formées. Ce n'est toutefois qu'un début. L'Afghanistan a besoin de plus de 5.000 sages-femmes pour qu'un accoucheur qualifié soit présent à chaque naissance.

Ce programme du JHPIEGO ne se contente pas de former quelques centaines de sages-femmes : il s'emploie aussi à changer de manière fondamentale la sélection, la formation et le déploiement de ces intervenantes essentielles à la réduction de la mortalité maternelle ainsi que le soutien qui leur est accordé. Les sages-femmes déjà sorties diplômées ont montré l'ampleur de leur motivation et de leur attachement à leur profession de même qu'à la cause des nombreuses Afghanes qui ont besoin de leur aide. En fait, en mai 2005, la toute nouvelle Association des sages-femmes de l'Afghanistan a tenu sa première réunion au cours de laquelle elle a adopté des statuts, a élu des membres de son bureau de direction et a été reconnue par la Confédération internationale des sages-femmes.

Une mère, son bébé dans les bras, consulte une infirmière en Afrique de l'Ouest.
Une mère, son bébé dans les bras, consulte une infirmière en Afrique de l'Ouest.
Melissa May, Photoshare

La mise d'accoucheurs qualifiés au service des femmes

L'accroissement de la proportion des naissances qui ont lieu en présence d'un accoucheur qualifié est un objectif international reconnu au niveau international. Pour autant, le manque d'accès aux soins fait que le nombre d'accouchements assistés par un personnel qualifié demeure faible dans beaucoup de pays.

Pays au terrain difficile et accidenté, le Népal connaît un taux élevé de mortalité maternelle (539 décès pour 100.000 naissances). En 2001, 13 % seulement des Népalaises avaient un accoucheur qualifié au moment de la naissance. Comme la majorité de la population vit en milieu rural, c'est dans ces zones qu'il faut mettre à la disposition des femmes les services d'un personnel qualifié pour garantir que les accouchements auront lieu dans de bonnes conditions.

Le JHPIEGO, qui œuvre en partenariat avec le programme népalais de santé familiale (NFHP), lui aussi financé par l'USAID, s'emploie à développer les connaissances et les compétences des sages-femmes auxiliaires afin qu'elles puissent dispenser des soins médicaux aux femmes enceintes ainsi que des services de planification familiale à toutes les femmes. En outre, il s'efforce d'augmenter la capacité de formation préalable des écoles pour qu'un nombre croissant d'accoucheurs qualifiés répondent aux besoins des femmes. Quant au NFHP, il étend son action aux agents de santé communautaires et aux travailleuses de la santé pour créer un lien entre la population locale et le personnel soignant dans des « établissements périphériques », c'est-à-dire des hôpitaux de district, des centres médicaux et des postes ou des sous-postes sanitaires, ce qui rend les services plus accessibles en milieu rural.

Le soutien apporté aux accoucheurs qualifiés

Il ne faut pas croire que les accoucheurs qualifiés et compétents pourront forcément sauver la vie des accouchées. Pour réduire l'incidence des décès maternels, ils doivent travailler dans un environnement qui facilite et qui appuie leur action. Au nombre des facteurs essentiels à la création d'un tel environnement figurent l'existence d'une politique, de lois et de règlements favorables, une infrastructure sanitaire efficace, la présence d'associations professionnelles ainsi que la mise en place d'un système d'enseignement de qualité et d'un encadrement positif. Le JHPIEGO joint son action à celle de partenaires du monde entier en vue précisément de créer l'environnement dont ont besoin les accoucheurs qualifiés.

La formulation de lignes directrices cliniques relatives à la prise en charge des complications de la grossesse et de l'accouchement est la condition préalable à l'élaboration non seulement d'une politique capable de créer un environnement favorable, mais aussi de protocoles cliniques et d'outils de travail qui donnent aux prestataires les moyens d'assumer leurs responsabilités. De concert avec toute une gamme d'organisations, de bailleurs de fonds et d'organismes techniques et grâce à son programme de santé maternelle et néonatale, le JHPIEGO a joué un rôle prépondérant dans la rédaction du manuel de l'Organisation mondiale de la santé qui a pour titre Prise en charge des complications de la grossesse et de l'accouchement. Ce manuel a été traduit en 16 langues (notamment en espagnol, en français, en laotien, en indonésien et en mandarin), et c'est aujourd'hui un texte de base dans 40 facultés de médecine. Il sert à enrichir le dialogue sur les mesures à prendre et à étoffer l'élaboration de normes nationales en Afrique, en Asie et en Amérique latine. Ainsi, les gouvernements du monde entier disposent d'un guide relatif aux pratiques d'importance vitale et qui sont fondées sur des preuves ; quant aux prestataires des services de santé, ils ont sous la main un manuel qui leur explique comment faire face aux complications de la grossesse et de l'accouchement.

Les associations professionnelles épaulent les accoucheurs qualifiés pour qu'ils se montrent à la hauteur du haut niveau d'excellence attendu d'eux. En Indonésie, par exemple, le programme MNH de santé maternelle et néonatale, qui apporte son concours à l'Association indonésienne des sages-femmes sous la forme d'activités professionnelles et de formation, a mobilisé les sages-femmes en faveur des habitantes d'Aceh, à la suite du tsunami survenu en décembre 2004. Alors même qu'elles avaient perdu des membres de leur famille, les sages-femmes d'Aceh ont répondu présentes à l'appel. Elles ont aidé des bébés à voir le jour dans des centres d'hébergement, dans des placards ou dans d'autres structures encore en place et elles ont dispensé des soins d'importance vitale aux nouvelles mères.

Un grand nombre de sages-femmes d'Aceh ont été emportées par le tsunami, et celles qui ont survécu n'avaient plus le matériel, les fournitures ni les installations dont elles avaient besoin pour s'acquitter de leur tâche. Grâce au financement du bureau de l'USAID chargé de l'assistance en cas de catastrophes à l'étranger, le JHPIEGO aide l'Association indonésienne des sages-femmes à mobiliser ses adhérentes dans d'autres régions du pays pour qu'elles forment de nouvelles recrues à Aceh. Déjà, près d'une centaine de sages-femmes se sont rendues à Aceh, et le nombre de femmes à avoir acquis les compétences nécessaires pour pratiquer des accouchements est encore plus élevé.

L'établissement de rapports entre les accoucheurs qualifiés et les collectivités

Le programme MNH de santé maternelle et néonatale dans le district de Koupela, au Burkina-Faso, constitue un exemple des programmes qui mettent en rapport les femmes enceintes avec des accoucheurs qualifiés. Au Burkina-Faso, selon des institutions de l'ONU, on compte 498 décès de femmes, essentiellement dus aux hémorragies et aux infections, pour 100.000 naissances. De concert avec un certain nombre de partenaires, dont le Fonds des Nations unies pour l'enfance, le Plan Burkina, « Family Care International  », le Fonds des Nations unies pour la population et l'association américaine sans but lucratif Mwangaza, le programme MNH s'emploie à consolider le système de prestation de services de santé tout en enseignant aux collectivités à revendiquer le droit à des services capables de sauver la vie de femmes.

Au Burkina-Faso, le programme MNH a conjugué ses efforts à ceux de la Division de la santé familiale et génésique en vue d'appliquer une politique relative à la maternité sans risques qui sert de base à toutes les autres activités du programme. Des aide-mémoire ont été conçus pour rappeler aux prestataires les méthodes, normes et protocoles fondés sur des preuves et qui ont trait à la maternité sans risques. Le programme a intégré des aspects des soins cliniques et de la participation de la population en œuvrant avec des comités de district du ministère de la santé, des prestataires de soins médicaux et la collectivité ; il a notamment tenu à définir des normes dans le secteur des soins médicaux en vue d'améliorer les services. En outre, il a fait appel aux accoucheuses traditionnelles, qui sont garantes de la prestation de services conformes aux sensibilités culturelles et qui sont acceptées par les femmes et leur famille. En 2004, au bout de la cinquième année d'existence du projet, le pourcentage des femmes qui avaient eu au moins 4 quatre visites médicales prénatales était passé de 21 % à 44 %, et le taux d'accouchements assistés par un personnel qualifié avait atteint 58 %, contre 39 % précédemment.

L'objectif ultime

Vers 1870, on dénombrait plus de 600 décès maternels pour 100.000 naissances dans les pays industriels. En 1900, le coefficient de mortalité maternelle avait diminué de moitié en Suède et de près du quart en Angleterre, au Pays de Galles et dans d'autres parties du monde occidental. C'était avant les débuts de l'obstétrique moderne, autrement dit avant l'accès aux antibiotiques, aux transfusions sanguines et aux césariennes. La diminution du nombre des décès maternels tenait donc à d'autres facteurs, telles la prise de conscience accrue du problème, la promulgation de lois visant à encourager la fourniture de soins spécialisés au moment de l'accouchement, la mise en place de programmes nationaux relatifs à la formation et à la répartition géographique d'un nombre adéquat d'accoucheurs qualifiés, ainsi que la formulation et l'application de normes concernant les services que prodiguent ces professionnels de la santé.

Des organismes du gouvernement des États-Unis, tel l'USAID, font cause commune avec des organisations non gouvernementales et d'autres groupes déterminés, comme eux, à faire fond sur les programmes et les progrès d'hier et d'aujourd'hui. À l'avenir, grâce aux efforts de ces organisations, davantage de femmes seront en mesure de survivre à l'accouchement et d'élever les enfants du monde.

Les objectifs internationaux de développement : les progrès réalisés

Les opinions exprimées dans le présent article ne reflètent pas nécessairement les vues ou la politique du gouvernement des États-Unis.

Les objectifs internationaux de développement : les progrès réalisés