Droits de l'homme | La défense de la dignité humaine

06 juin 2008

Introduction du Rapport 2008 du département d'État sur la traite des personnes

Le rapport a pour objectifs de sensibiliser l'opinion mondiale et de renforcer la lutte.

(Début du texte)

Département d'État
Washington
4 juin 2008

[Voir le rapport intégral en anglais en format PDF à http://www.state.gov.]

Le Rapport 2008 sur la traite des personnes dans le monde

INTRODUCTION

Le département d'État est légalement tenu de soumettre tous les ans au Congrès un rapport sur les efforts déployés par les gouvernements étrangers pour éliminer les pires formes de la traite des personnes. Le présent rapport est le septième de la série. Il a pour but de sensibiliser l'opinion mondiale, de souligner les efforts de la communauté internationale et d'encourager les gouvernements étrangers à prendre des mesures efficaces pour lutter contre toutes les formes de traite des personnes.

La législation américaine qui guide les efforts de lutte contre la traite des personnes, la Loi de 2000 sur la protection des victimes de la traite (TVPA) telle que modifiée, précise que l'objet de cette lutte est de punir les trafiquants, de protéger les victimes et de prévenir la traite. Libérer ceux qui sont dans une situation de quasi-servitude est le but ultime de ce rapport - et de la politique américaine de lutte contre la traite.

La traite des personnes est une menace multiple : elle prive les individus de leurs droits et de leurs libertés, elle augmente les risques sanitaires à l'échelle mondiale et elle alimente la croissance de la criminalité organisée.

La traite des personnes a un effet dévastateur sur les victimes qui font l'objet de sévices physiques ou moraux, de viols, de menaces contre elles ou leur famille, de vol de document, voire qui en meurent. Mais l'effet de la traite des personnes va au-delà de l'impact qu'elle a sur les personnes : elle sape la santé et la sécurité des nations.

Le nombre des pays qui font de gros efforts pour éliminer ce crime atroce ne cesse de grandir. Un pays qui ne prend pas de mesures énergiques pour respecter les normes minimales d'élimination de la traite des personnes, telles que définies par la TVPA, se voit classé dans la « troisième catégorie », ce qui peut amener la suspension de l'aide non humanitaire et non liée au commerce extérieur que lui fournissent les États-Unis. Pour évaluer les efforts faits par les gouvernements étrangers, le rapport sur la traite des personnes donne la priorité à trois principes (les « trois p ») : poursuites judiciaires, protection et prévention. L'approche axée sur les victimes lui fait mettre également en exergue trois autres principes (les « trois r ») : récupération, réhabilitation et réintégration, et encourage l'acquisition et le partage des meilleures pratiques dans ces domaines. Nous devons dépasser le stade de la récupération initiale des victimes et rétablir leur dignité et l'espoir d'une vie productive.

Définition de la traite des personnes

La loi TVPA définit les « formes graves de la traite » comme étant :

a. la traite à des fins d'exploitation sexuelle où un rapport sexuel commercialisé est imposé par force, fraude ou coercition ou dans lequel la personne contrainte à ce rapport n'a pas atteint 18 ans, ou

b. le recrutement, l'hébergement, le transport, la fourniture ou l'obtention d'une personne à des fins de travail ou de service par le biais de la force, de la fraude ou de la coercition à des fins de servitude involontaire, d'assujettissement, de servitude pour dette ou d'esclavage.

Il n'est pas nécessaire que la victime soit transportée d'un endroit à un autre pour que le délit tombe dans le cadre de l'une de ces définitions.

Ampleur et nature de l'esclavage moderne

Tous les scénarios de la traite des personnes ont un certain nombre de points en commun : le recours à la force, à la fraude et à la coercition à des fins d'exploitation d'une personne à des fins monétaires. Elle peut être victime d'exploitation sexuelle ou d'exploitation au travail, ou des deux. L'exploitation au travail couvre l'esclavage, le travail forcé, et la servitude pour dette. L'exploitation sexuelle inclut en général des sévices dans le cadre de l'industrie du sexe. Dans d'autres cas, les victimes sont exploitées dans les résidences d'individus qui exigent aussi souvent des rapports sexuels en plus du travail. Le recours à la force et à la coercition peut être direct et violent ou psychologique.

Il existe une large gamme d'estimations quant à l'ampleur et à la magnitude de cet esclavage moderne. L'Organisation internationale du travail (OIT) - agence des Nations Unies chargée des questions liées aux normes du travail, de l'emploi et de la protection sociale - estime à quelque 12,3 millions d'individus le nombre des travailleurs forcés, travailleurs serviles, enfants asservis et esclaves sexuels ; d'autres estimations font état de 4 à 27 millions de victimes.

Selon une étude parrainée par le gouvernement américain et terminée en 2006, quelque 800.000 personnes font l'objet d'un trafic transfrontalier chaque année, ce chiffre n'incluant pas celles qui font l'objet de la traite dans leur propre pays. Environ 80 % des victimes transnationales sont des femmes et des filles, jusqu'à 50 % sont des mineur(e)s, et la majorité est vendue pour une exploitation sexuelle commerciale. Ces chiffres n'incluent pas les millions de femmes et d'hommes qui sont victimes de la traite à l'intérieur de leur propre pays - dont la majorité pour un travail forcé ou servile.

Les marchands d'esclaves s'attaquent aux personnes vulnérables. Ils prennent souvent pour cible les enfants et les jeunes femmes et sont inventifs et sans pitié dans leurs stratagèmes, conçus pour tromper ou contraindre leurs victimes potentielles ou pour s'attirer leur confiance : promesses de mariage, d'emploi, de possibilités d'éducation ou de vie meilleure sont parmi les méthodes les plus fréquentes qu'ils emploient.

Les nationalités des victimes de la traite sont aussi diverses que les cultures du monde. Certaines quittent leur pays en développement et cherchent à améliorer leurs conditions de vie en trouvant des emplois peu qualifiés dans des pays plus prospères ; d'autres sont victimes du travail forcé ou servile dans leur propre pays. Certaines familles confient leurs enfants à des parents ou d'autres adultes qui leur promettent une éducation et des opportunités mais qui les vendent en servitude pour de l'argent. Mais la seule pauvreté n'explique pas ce drame que perpétuent des recruteurs et des patrons crapuleux ainsi que des responsables corrompus qui cherchent à profiter illégalement du désespoir d'autrui.

Précisions sur le rapport de 2008 sur la traite des personnes.

Le rapport de 2007 est le rapport le plus complet sur les efforts lancés par les gouvernements partout dans le monde pour lutter contre les pires formes de la traite des personnes. Il porte sur la période allant d'avril 2007 à mars 2008. Il couvre les pays considérés comme pays d'origine, de transit et de destination d'un nombre important de victimes des pires formes de traite des personnes. Il présente un panorama mondial et à jour de la nature et de la portée de l'esclavage moderne et de la large gamme de mesures prises par les gouvernements pour s'y attaquer et l'éliminer.

Étant donné que la traite existe probablement dans tous les pays du monde, l'omission d'un pays peut simplement indiquer que l'on ne dispose pas d'informations appropriées à son sujet. La description de la situation dans les divers pays comprend l'ampleur et la nature du problème de la traite des personnes, les raisons de l'inclusion du pays dans le rapport et les efforts lancés par le gouvernement pour lutter contre la traite. Elle donne aussi une évaluation de la mesure dans laquelle les pouvoirs publics respectent les normes minimales pour l'élimination de la traite telles que les énonce la Loi de 2000 sur la protection des victimes de la traite (TVPA), et inclut des suggestions de mesures de lutte contre la traite. Elle se termine par un exposé des efforts menés par l'État pour faire respecter la législation contre la traite, protéger les victimes et prévenir la traite. Elle explique enfin les raisons de l'inscription du pays dans la Catégorie 1, 2, 2 liste de veille ou 3. Si un État a été placé dans la catégorie 2 liste de veille, elle explique la raison de cette décision, utilisant les critères de la TVPA.

La TVPA définit trois facteurs qui déterminent s'il convient d'inscrire un pays dans la Catégorie 2 (ou Catégorie 2 liste de veille) ou dans la Catégorie 3 : 1) la mesure dans laquelle le pays est un pays d'origine, de transit ou de destination des formes graves de traite des personnes ; 2) la mesure dans laquelle les autorités dudit pays ne respectent pas les normes minimales de la TVPA et notamment l'importance dans les milieux du gouvernement de la corruption liée à la traite ; et 3) les ressources et la capacité des pouvoirs publics de s'attaquer aux pires formes de la traite des personnes et de les éliminer.

Certains États ont organisé des conférences et créé des groupes de travail ou des plans d'action visant à dégager des objectifs en matière de lutte contre la traite. Quoique utiles, notamment pour renforcer les mesures de répression, de protection et de prévention, ces conférences, plans et groupes ne pèsent pas lourdement, à eux seuls, dans l'évaluation des efforts d'un État. Le présent rapport vise plutôt les actions concrètes que les gouvernements ont prises pour lutter contre la traite, surtout les poursuites judiciaires, les condamnations et les peines de prison infligées aux trafiquants, les mesures de protection des victimes et la prévention. Le rapport ne tient guère compte, non plus, des projets de loi ou des lois qui ne sont pas encore entrées en vigueur. Enfin, il ne s'intéresse que dans une mesure limitée aux efforts des pouvoirs publics qui contribuent indirectement à la diminution de la traite, par exemple les programmes d'information, la promotion du développement économique ou les programmes visant à établir l'égalité hommes-femmes, si louables ces activités soient-elles.

Méthodologie

Le département d'État a préparé ce rapport à partir des informations fournies par les ambassades des États-Unis, des représentants de gouvernements étrangers, d'ONG et d'organisations internationales, de rapports écrits, lors de tournées d'information dans chaque région, ou soumises à l'adresse électronique tipreport@state.gov qui a été établie pour les ONG et les particuliers désireux de rendre compte des progrès réalisés par les gouvernements dans la lutte contre la traite. Nos postes diplomatiques nous tiennent au courant de la situation de la traite et des mesures prises par les gouvernements en se fondant sur des recherches approfondies et des entretiens avec une grande variété de sources : représentants des gouvernements, des ONG nationales et internationales et des organisations internationales, fonctionnaires, journalistes, universitaires et survivants.

Pour rédiger le rapport de cette année, le département d'État a réexaminé les sources d'information de chaque pays pour informer ses évaluations. Celles-ci se font en deux étapes :

Première étape : nombre important de victimes

Dans un premier temps, le département d'État détermine si le pays est un pays « d'origine, de transit ou de destination d'un nombre important de victimes des pires formes de traite des personnes », en retenant généralement le chiffre de quelque 100 victimes comme seuil, comme les années précédentes. Certains pays pour lesquels on ne dispose pas de chiffres n'ont pas été classés, mais sont inclus dans le chapitre des « cas spéciaux » puisqu'ils présentent des indices de traite des personnes.

Deuxième étape : placement dans une catégorie

Le département d'État inscrit chaque pays inclus dans le rapport 2008 sur une des trois listes (catégories) prescrites par la TVPA. Cette inscription (classement) se fonde plus sur les efforts menés par le gouvernement pour combattre la traite que sur l'ampleur du problème, aussi important que ce soit ce facteur. Il détermine d'abord si le gouvernement en question respecte dans leur totalité les normes minimales de la TVPA pour l'élimination de la traite. Les gouvernements qui le font sont inscrits dans la Catégorie 1. Pour les autres, le département examine s'ils ont fait d'importants efforts pour les respecter : ceux qui ont fait des efforts importants pour se mettre en conformité avec ces normes sont placés dans la Catégorie 2 ; ceux qui ne respectent pas les normes minimales et ne font pas d'efforts importants pour s'aligner sur elles sont placés dans la Catégorie 3. Enfin, les critères de la Catégorie 2 liste de veille sont pris en compte et, le cas échéant, les pays inscrits dans la Catégorie 2 sont placés dans cette dernière catégorie.

La liste de veille - Catégorie 2 surveillance spéciale

La TVPA a créé une « liste de surveillance spéciale » des pays du rapport qui doivent faire l'objet d'un contrôle plus serré. Elle couvre : 1) les pays inscrits dans la Catégorie 1 dans le présent rapport mais qui étaient dans la Catégorie 2 du rapport 2007 ; 2) les pays inscrits dans la Catégorie 2 dans le présent rapport mais qui étaient dans la Catégorie 3 du rapport 2007 ; et 3) les pays inscrits dans la Catégorie 2 dans le présent rapport :

a. - où le nombre absolu des victimes des pires formes de la traite est très élevé ou augmente sensiblement ;

b. - dont le gouvernement n'est pas en mesure de montrer qu'il a sensiblement renforcé ses mesures de lutte contre les pires formes de la traite, notamment en augmentant le nombre des enquêtes, des poursuites judiciaires et des condamnations pour crime de traite des personnes, en accroissant l'aide aux victimes et en réduisant la complicité dans les pires formes de la traite des personnes ; ou

c. - pour lesquels il a été décidé, sur la base d'engagements de prendre des mesures complémentaires au cours de l'année, que le gouvernement fait des efforts sensibles pour respecter les normes minimales.

Cette catégorie (avec les points a, b et c) a été nommée par le département d'État « Catégorie 2, liste de veille ». Dans le rapport 2007, 32 pays y étaient inscrits. Au total, 42 pays ont été inclus, avec les 2 qui avaient été reclassés dans la liste de veille en octobre 2007 et les 7 qui remplissaient les conditions des deux points ci-dessus (rehaussés par rapport au rapport de 2007), dans l' « évaluation intérimaire » publiée par le département d'État le 28 février 2008.

Des 34 pays inscrits dans la liste de veille de la Catégorie 2 lors de l' « évaluation intérimaire », 11 ont été reclassés en Catégorie 2 dans le présent rapport alors que 4 sont tombés dans la Catégorie 3, les 19 autres restant dans la même catégorie. Les pays placés dans la liste de veille cette année feront l'objet d'une évaluation intérimaire qui sera soumise au Congrès d'ici le 1er février 2009.

Sanctions éventuelles pour les pays dans la Catégorie 3

Les gouvernements des pays inscrits en Catégorie 3 peuvent faire l'objet de certaines sanctions. Le gouvernement américain peut leur refuser des aides non humanitaires et non commerciales. Les pays qui ne reçoivent pas ce type d'aide peuvent se voir refuser des financements de participation à des programmes éducatifs ou d'échanges culturels. En application de la TVPA, ces gouvernements risquent aussi de se heurter à l'opposition des États-Unis lorsqu'ils sollicitent l'aide d'institutions financières internationales telles que le Fonds monétaire international ou de banques de développement multilatérales, telles que la Banque mondiale (l'aide humanitaire et commerciale et certains types d'aide au développement étant exclus de cette opposition). Ces conséquences possibles commenceront à se faire sentir à compter du début de la prochaine année budgétaire, le 1er octobre 2008.

La totalité ou une partie des sanctions imposées au titre de la TVPA peut être suspendue si le président des États-Unis juge que l'assistance permettrait de promouvoir les objectifs du statut ou qu'elle s'inscrit dans l'intérêt national des États-Unis. La loi prévoit également que les sanctions peuvent être suspendues en cas de besoin pour éviter des répercussions négatives possibles sur des populations vulnérables, y compris des femmes et des enfants. Les sanctions ne sont pas non plus appliquées si le président détermine, après la publication de ce rapport mais avant leur entrée en vigueur, que le pays concerné a appliqué les normes minimales ou fait des efforts importants dans ce domaine.

Quelle que soit la catégorie dans laquelle ils se trouvent, tous les pays, y compris les États-Unis, peuvent faire mieux. Aucun classement n'est permanent. Tous les pays doivent poursuivre et accroître leurs efforts de lutte contre la traite des personnes.

Utilisation du rapport

Ce rapport est un outil diplomatique que le gouvernement américain utilise pour poursuivre le dialogue et encourager certains gouvernements et qui l'aide à concentrer les ressources sur la politique et les programmes de poursuite des trafiquants, de protection des victimes et de prévention de la traite. Le département d'État continuera à s'entretenir avec les gouvernements étrangers sur le contenu du rapport afin de renforcer les efforts communs lancés pour éradiquer la traite des personnes. Au cours de l'année qui vient, et plus particulièrement dans les mois qui précéderont la détermination des sanctions à l'encontre des pays de la catégorie 3, le département d'État utilisera les informations recueillies pour la préparation du rapport pour mieux cibler les programmes d'assistance et œuvrer avec les pays qui ont besoin d'aide pour lutter contre la traite des personnes. Il espère que le rapport servira de catalyseur des efforts gouvernementaux et non gouvernementaux de lutte contre la traite des personnes partout dans le monde.

Travail servile et servitude sexuelle : formes diverses de la traite des personnes

En raison de la nature occulte de la traite des personnes, il n'est pas possible de dénombrer avec précision les victimes du phénomène de par le monde ; toutefois, les recherches disponibles indiquent que lorsque l'on inclut dans les calculs la traite des personnes à l'intérieur des pays, le nombre de victimes du trafic lié au travail dépasse celui des victimes de la traite des personnes à des fins sexuelles. Bien que ces deux formes de traite des êtres humains soient généralement analysées comme des problèmes distincts, leurs victimes ont souvent un dénominateur commun qui est que leurs épreuves ont pour point de départ une migration en quête de ressources économiques.

Le thème de la migration figure en bonne place dans les rapports sur la traite des personnes et le déplacement des victimes est effectivement une caractéristique commune de nombreux cas de traite des personnes. Mais le déplacement n'est pas une composante intrinsèque de la servitude. Dans l'analyse de la traite des personnes et lors de la conception de ripostes efficaces, il convient de prêter attention à l'exploitation des personnes et au contrôle exercé sur elles par la force, la fraude ou la coercition, et non pas sur les déplacements de ces personnes.

Ni la définition internationale de la traite des personnes, telle qu'elle figure dans le Protocole de la Convention des Nations unies visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants de 2000, ni la définition américaine des formes graves de la traite des personnes, énoncée dans la législation fédérale, ne prennent en considération le déplacement de la victime. Est victime de la traite des personnes, selon ces définitions, toute personne qui est recrutée, hébergée, livrée ou obtenue par le biais de la force, de la fraude ou de la coercition à des fins de servitude involontaire, de travail forcé ou d'exploitation sexuelle commerciale.

Les principaux types de traite des personnes

Le travail servile

La plupart des cas de travail forcé se rencontrent lorsque des employeurs sans scrupules profitent des bavures dans l'application de la législation pour exploiter des travailleurs vulnérables. Ces derniers sont rendus encore plus vulnérables aux pratiques du travail forcé par le chômage, la pauvreté, la criminalité, la discrimination, la corruption, les conflits politiques et l'acceptation culturelle de ces pratiques. Les immigrants sont particulièrement vulnérables mais on trouve des personnes assujetties au travail forcé dans leur propre pays. Les femmes assujetties au travail forcé ou à la servitude pour dette, et surtout les femmes et les filles ayant des emplois domestiques, sont souvent aussi victimes d'abus sexuels.

Le travail servile est une forme de traite qui est plus difficile à cerner et à chiffrer que la traite à des fins de sexe mais elle peut être plus importante si l'on compte la traite interne. Elle n'implique pas nécessairement les mêmes réseaux criminels qui profitent de la traite transnationale à des fins sexuelles : le plus souvent, les individus sont coupables de traiter en esclave un serviteur ou bien des centaines d'ouvriers non payés dans une usine.

Travail servile pour dette

Une forme de force ou de coercition est le recours à une caution ou une dette pour tenir une personne en état d'assujettissement. En droit et en politique, cette pratique est connue sous le nom de « travail servile » ou de « servitude pour dettes ». Elle est criminalisée dans le droit américain et incluse comme une forme d'exploitation liée à la traite des personnes dans le Protocole additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfant. Partout dans le monde, de nombreux travailleurs tombent victimes de la servitude pour dette lorsqu'un trafiquant ou un recruteur exploite illégalement une dette initiale assumée par le travailleur aux termes de son contrat ou lorsque des travailleurs « héritent » d'une dette dans les systèmes plus traditionnels de travail servile. En Asie du Sud, un nombre énorme de personnes sont ainsi asservies d'une génération à l'autre.

Travail servile et servitude involontaire chez les travailleurs étrangers

La vulnérabilité des travailleurs migrants aux machinations des trafiquants est d'autant plus préoccupante que cette population est très importante dans certaines régions. On peut lui trouver trois grandes causes : i) les abus dans les contrats ; 2) l'inadéquation de la législation locale régissant le recrutement et l'emploi des travailleurs migrants ; et 3) l'imposition intentionnelle de charges et de dettes souvent illégales dans le pays ou l'état d'origine de ces travailleurs, souvent avec la complicité ou le soutien des agences d'emploi et des employeurs du pays de destination.

Certaines violations de contrats et certaines conditions dangereuses d'emploi ne constituent pas en elles-mêmes un travail servile, encore que le recours à la violence ou à la menace en vue de contraindre un travailleur à accepter ou à continuer un travail ou un service peut dégénérer en une situation de travail forcé. Les coûts imposés à des travailleurs manuels pour avoir le « privilège » de travailler à l'étranger peut placer ces travailleurs dans une situation qui peut les exposer à une condition de servitude. Lorsqu'on les combine à l'exploitation de la part d'intermédiaires ou d'employeurs sans scrupules dans le pays de destination, ces coûts ou ces dettes, s'ils sont excessifs, peuvent devenir un type de travail forcé.

Servitude domestique involontaire

Les travailleurs domestiques peuvent se trouver en situation de servitude involontaire du fait du recours à la force ou à la coercition, dont les abus physiques (y compris sexuels) et psychologiques. Les enfants sont particulièrement vulnérables. La servitude domestique est particulièrement difficile à déceler parce qu'elle se produit dans des lieux privés qui ne sont pas réglementés par les pouvoirs publics. Par exemple, dans certains des pays riches d'Asie et du Proche-Orient il existe une forte demande de travailleurs domestiques qui deviennent quelquefois victimes de la servitude involontaire.

(…)

Travail forcé des enfants

La plupart des organisations internationales et des législations nationales indiquent que les enfants peuvent légalement se livrer à de petits travaux. Par contre, les formes les plus intolérables du travail des enfants sont ciblées à des fins d'élimination par tous les pays du monde. La vente et la traite des enfants et leur subjugation dans le travail servile et forcé sont clairement les pires formes du travail des enfants. Tout enfant victime de la servitude involontaire, du travail servile, de l'asservissement ou de l'esclavage par force, fraude ou coercition est victime de la traite des personnes quel que soit l'endroit de cette exploitation.

Enfants soldats

La guerre des enfants est une forme exceptionnelle et particulièrement grave de la traite des personnes qui implique le recrutement illégal d'enfants, par force, fraude ou coercition, dans le but de les exploiter ou de les utiliser comme esclaves sexuels dans les zones de conflits. Ces pratiques illégales peuvent être le fait de forces gouvernementales, d'organisations paramilitaires et de groupes rebelles. L'UNICEF estime que plus de 300.000 enfants de moins de 18 ans sont ainsi exploités dans plus de 30 conflits armés. Si la majorité d'entre eux ont entre 15 et 18 ans, certains n'ont que 7 ou 8 ans.

De nombreux enfants sont enlevés pour être utilisés comme combattants. D'autres sont obligés de servir dans la plus complète illégalité comme porteurs, cuisiniers, gardes, servants, messagers, voire espions. De nombreuses filles, jeunes, sont contraintes d'épouser ou d'avoir des relations sexuelles avec les combattants et elles courent de grands risques de grossesse. Les enfants soldats, garçons et filles, sont souvent victimes de sévices sexuels et courent de très grands risques de contracter des maladies sexuellement transmissibles.

Certains enfants ont été obligés de commettre des atrocités contre leur famille ou leur communauté. Les enfants soldats sont souvent tués ou blessés et les survivants souffrent souvent de traumatismes multiples et montrent des cicatrices psychiques. Leur développement personnel est souvent irrémédiablement compromis. Ceux qui reviennent sont aussi souvent rejetés par leur village.

Le recrutement d'enfants soldats est un phénomène mondial. Le problème le plus critique est en Afrique et en Asie mais dans les Amériques et au Moyen-Orient, des groupes armés utilisent aussi illégalement des enfants dans les conflits armés. Tous les pays doivent travailler ensemble et avec les organisations internationales et les ONG et prendre des mesures urgentes afin de désarmer, démobiliser et réintégrer les enfants soldats.

Traite des personnes à des fins d'exploitation sexuelle et de prostitution

La traite des personnes à des fins d'exploitation sexuelle est la sous-catégorie la plus importante de l'esclavage transnational moderne. Elle n'existerait pas sans l'explosion de la demande mondiale de sexe commercial. Le gouvernement américain a adopté une position ferme contre la prostitution dans une décision de décembre 2002 qui dit qu'elle est en soi nuisible et déshumanisante et qu'elle alimente la traite des personnes. Transformer des êtres humains en des sortes de marchandises déshumanisées crée des conditions propices à la traite de personnes.

Le gouvernement des États-Unis s'oppose à la prostitution et à toute activité qui y est liée, notamment le proxénétisme, les activités d'entremetteuse ou le maintien de maisons de prostitution, comme des actes qui contribuent au phénomène de la traite des personnes, et soutient que ces activités ne doivent pas être réglementées comme une une forme légitime de travail pour un être humain. Ceux qui font usage des services sexuels commerciaux entretiennent une demande que les trafiquants cherchent à satisfaire.

Les enfants victimes d'exploitation sexuelle commerciale

Chaque année, plus de deux millions d'enfants sont victimes de l'industrie mondiale du sexe. Ils sont pris au piège de la prostitution en dépit des accords et protocoles internationaux qui imposent à leurs signataires l'obligation de criminaliser l'exploitation sexuelle commerciale des enfants. L'utilisation des enfants dans l'industrie du sexe est interdite dans le cadre de la législation américaine et du Protocole à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants. Il n'existe aucune exception et aucune rationalisation culturelle ou socio-économique qui empêche de secourir les enfants et les sortir de la servitude sexuelle. Les termes tels que « travailleur du sexe » sont inadmissibles car ils trivialisent la brutalité de cette exploitation.

Le tourisme sexuel impliquant des enfants

Le tourisme sexuel impliquant des enfants désigne les déplacements d'individus qui se rendent à l'étranger pour avoir des relations sexuelles commerciales avec des enfants. C'est une pratique honteuse contre la dignité des enfants et elle constitue une forme violente d'abus de l'enfant. L'exploitation sexuelle des enfants a des conséquences dévastatrices sur les mineurs : traumatismes physiques et psychiques de longue durée, maladies (y compris VIH/sida), toxicomanies, grossesses non voulues, malnutrition, ostracisme social, voire décès.

De nombreux touristes se rendent dans des pays en développement pour avoir dans l'anonymat des relations sexuelles avec des enfants prostitués. Ce crime est généralement favorisé par les carences de l'application des lois, la corruption, l'Internet, la facilité des voyages et la pauvreté. Les délinquants sexuels viennent de tous les horizons socioéconomiques et certains peuvent même occuper des postes de confiance. Parmi les ressortissants des États-Unis ayant pratiqué le tourisme sexuel impliquant des enfants figurent un pédiatre, un sergent de l'Armée de terre en retraite, un dentiste et un professeur universitaire. La pornographie enfantine a souvent sa place dans ces affaires et les auteurs des faits peuvent aussi se servir de drogues pour commettre des actes sexuels avec les mineurs ou pour les contrôler.

Répression appropriée de la traite des personnes

L'analyse des efforts déployés par les pouvoirs publics de pays étrangers contenue dans le rapport porte en grande partie sur les sanctions imposées aux auteurs de la traite des personnes et sur la protection des victimes. On trouvera ci-dessous un aperçu du processus d'analyse, fondé sur les normes prévues par la TVPA.

Les normes minima énoncées dans ce texte demandent à tous les gouvernements de pays étrangers d'interdire toutes les formes de traite des personnes, de prévoir des sanctions qui soient suffisamment sévères pour avoir un effet dissuasif et qui reflètent la nature gravissime des crimes, et d'imposer des peines rigoureuses aux personnes reconnues coupables de ces crimes.

Sanctions imposées par la loi : Dans l'évaluation des efforts déployés par les gouvernements étrangers pour lutter contre la traite des personnes dont il est rendu compte dans le rapport de 2008 sur la question, le département d'État considère que conformément à la Convention des Nations unies contre la criminalité transnationale organisée de 2000 (complétée par le Protocole additionnel visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants), les sanctions pénales prévues devraient être au minimum de quatre ans de privation de liberté ou plus sévères.

Peines prononcées : Le département d'État considère que les peines prononcées doivent comprendre une incarcération de longue durée, la majorité des affaires étant sanctionnées par des peines privatives de liberté d'un an ou plus, mais qu'il faut également tenir compte de la gravité de l'implication des coupables dans la traite et des autres crimes graves commis simultanément, et du droit du pouvoir judiciaire de prononcer des peines conformément à la législation en vigueur dans le pays. Les condamnations obtenues en vertu d'autres lois et dispositions pénales peuvent être comptées au nombre des mesures de lutte contre la traite des personnes si les autorités gouvernementales confirment que les infractions commises comportaient également une traite des personnes.

La protection appropriée des victimes

Le critère minimum de la TVPA concernant la protection des victimes vise notamment à déterminer :

- « si le gouvernement du pays protège les victimes des pires formes de la traite des personnes et les encourage à fournir leur assistance dans les enquêtes et la poursuite judiciaire de cette traite, notamment en offrant des options juridiques autres que leur déportation dans un pays où elles seraient assujetties à des représailles ou à des conditions de vie pénibles, et garantit qu'elles ne sont pas emprisonnées à tort, soumises à des amendes ou pénalisées uniquement pour des actes illicites découlant directement de ce qu'elles sont victimes de la traite des personnes »

Ces trois composantes sont examinées spécifiquement dans les comptes-rendus narratifs relatifs aux pays contenus dans le Rapport sur la traite des personnes. En outre, le département d'État a décidé d'appliquer ce critère compte tenu des lignes directrices suivantes :

Dans l'évaluation visant à déterminer si un pays se conforme pleinement à cette norme minima de protection des victimes, le département d'État considère les points suivants comme constituant des facteurs essentiels :

1) Identification active des victimes : On ne saurait s'attendre à ce que les victimes viennent s'identifier elles-mêmes comme telles. Elles craignent généralement de se faire remarquer et d'être considérées par les autorités comme des criminels, des migrants en situation irrégulière ou des gens négligeables. Les procédures officielles de détection devraient consister en davantage qu'en de simples vérifications de papiers d'identité. Il conviendrait de mettre en place une procédure systématique pour guider les membres des forces de l'autre et autres intervenants de première ligne et pour les aider à identifier les victimes.

2) Logement et carte temporaire : Le gouvernement devrait veiller à ce que les victimes aient accès aux soins de santé primaires, aux conseils psychologiques et au logement, de manière à pouvoir relater, avec un minimum de pressions, les circonstances de leur victimisation à des travailleurs sociaux et à des agents des forces de l'ordre ayant reçu une formation spécialisée. Logement et assistance peuvent être fournis en coopération avec des ONG. La responsabilité du gouvernement du pays de destination s'étend à la mise en rapport des victimes avec les ONG et au financement des services rendus par celles-ci. Dans toute la mesure du possible, il faut éviter que les victimes de la traite des personnes soient logées dans des centres de détention des services d'immigration ou d'autres administrations.

Le département d'État attache également de l'importance à deux autres facteurs relatifs à la protection des victimes :

A. Protection et droits des victimes/témoins et respect de la confidentialité : Le gouvernement devrait veiller à ce qu'il soit apporté aux victimes une aide juridique et autre et à ce que, conformément à la législation nationale, les procédures ne portent pas atteinte aux droits, à la dignité ou au bien-être psychologique des victimes. Les droits afférents à la confidentialité et à la vie privée doivent être respectés et protégés dans la mesure du possible en vertu de la législation nationale. Les informations doivent être fournies aux victimes dans une langue qu'elles comprennent.

B. Rapatriement : Les pays d'origine et de destination se partagent la responsabilité de veiller au rapatriement volontaire, sûr et humain et, dans la mesure du possible, à la réinsertion sociale des victimes. Au minimum, les pays d'accueil devraient se mettre en rapport avec un organisme officiel, une ONG ou une organisation internationale compétents dans le pays d'origine pour s'assurer que les victimes du trafic des personnes revenant au pays reçoivent l'aide et le soutien nécessaires à leur bien-être. Les victimes ne doivent pas être soumises à des déportations forcées sans précautions ou autres mesures visant à réduire les risques de difficultés économiques, de représailles ou de revictimisation.

Prévention : accent mis sur la demande

La traite des personnes est un crime déshumanisant qui ravale les gens au rang de simples marchandises. Du côté de l'offre, les réseaux criminels, la corruption, le manque d'éducation et la mésinformation sur les possibilités d'emploi et la nature dégradante du travail promis, alliés à la pauvreté, rendent les gens vulnérables aux leurres des trafiquants, qu'il s'agisse de la traite à des fins d'exploitation sexuelle ou de la traite des travailleurs. D'importants efforts sont déployés pour réduire l'influence de ces facteurs qui « poussent » les gens à devenir victimes de la traite des personnes mais le phénomène n'est pas imputable à ces seuls facteurs. Le mouvement visant à éliminer la traite des personnes fait porter son attention de plus en plus sur la demande vorace qui alimente ce sinistre trafic.

La demande de main-d'œuvre à exploiter est créée par les employeurs peu scrupuleux qui cherchent à accroître leurs bénéfices aux dépens de travailleurs vulnérables par l'usage de la force, de la fraude ou de la coercition. L'un des moyens clés utilisables pour réduire cette demande consiste à sensibiliser le public à l'existence de cette exploitation dans la production de biens divers. Nombreux sont les consommateurs et les entreprises qui seraient troublés de savoir que les biens qu'ils achètent, vêtements, joaillerie et même denrées alimentaires, sont produits par des personnes, parfois des enfants, qui travaillent dans des conditions analogues à l'esclavage. Toutefois, sur le marché mondial des marchandises, ce n'est pas chose facile de s'assurer que les chaînes d'approvisionnement sont exemptes d'apports de travail forcé. L'interdiction de l'accès des produits résultant du travail forcé aux marchés étrangers aura pour effet, à terme, de réduire les incitatifs à l'exploitation d'une main-d'œuvre servile et d'encourager les comportements respectueux de la déontologie du travail. Les efforts dans ce sens voient leur efficacité s'accroître du fait de l'accroissement des informations sur les produits d'exportation et les chaînes de production disponibles auprès de diverses sources, notamment les gouvernements étrangers. Pour réussir, tout effort de lutte contre la traite à des fins d'exploitation sexuelle doit porter non seulement sur l'offre de personnes victimes du trafic mais également sur la demande de services sexuels commerciaux et de main-d'œuvre servile qui la perpétue. La politique des États-Unis établit un lien direct entre la prostitution et la traite des personnes. Comme il l'a noté dans un document officiel en décembre 2002, le gouvernement des États-Unis est opposé à la prostitution et aux activités qui y sont liées car elles contribuent au phénomène de la traite des personnes.

En 2005, la Commission de la condition de la femme des Nations unies a adopté une résolution présentée par les États-Unis sur l'élimination de la demande de femmes et de filles faisant l'objet de la traite pour toutes formes d'exploitation. C'était là la première résolution des Nations unies axée sur le côté de la demande de la traite des personnes, le but visé étant de protéger les femmes et les filles par un « assèchement du marché » des victimes, notamment en reconnaissant l'existence d'un lien avec l'exploitation sexuelle commerciale.

Importance de la recherche

En tant que nouveau champ d'investigation et d'intervention, les efforts de lutte contre la traite des personnes bénéficieront incontestablement d'une recherche spécialisée et en particulier d'une recherche opérationnelle conçue pour informer les programmes.

Un exemple important de la valeur de la recherche est fourni pour une étude financée par l'Office du suivi et de la lutte contre la traite des personnes, menée par le Dr Jay Silverman sur la traite à des fins d'exploitation sexuelle et le VIH en Asie du Sud, publiée l'été dernier dans le Journal de l'American Medical Association. On a estimé que la moitié des femmes et des filles victimes de la traite à des fins d'exploitation sexuelle en Asie du Sud ont moins de 18 ans lors du début de l'exploitation. Cependant, les recherches sur le VIH et les infections transmises sexuellement s'attachent rarement à identifier les victimes adultes ou infantiles de cette traite. Le Dr Silverman et son équipe ont travaillé en partenariat avec de grandes ONG de l'Inde, du Népal et du Bangladesh actives dans le domaine des secours et des soins apportés aux victimes de la traite et de l'exploitation sexuelle pour analyser ce phénomène, la prévalence du VIH et les facteurs de risque liés à la traite.

L'étude Silverman a constaté que parmi les Népalaises, femmes et filles, rapatriées après avoir été victimes de la traite à des fins d'exploitation sexuelle, 38 % étaient séropositives. Elles avaient été enlevées en majorité avant l'âge de 18 ans ; une victime sur sept l'avait été avant l'âge de 15 ans et plus de 60 % de ces filles très jeunes étaient infectées par le VIH. Ce pourcentage élevé s'explique par le fait que les filles de ce groupe étaient plus souvent renvoyées d'une maison de prostitution à l'autre et qu'elles avaient été prostituées pendant plus longtemps.

L'une des conclusions du Dr Silverman est que les filles qui sont le plus à risque d'infection par le VIH (et de contribuer à la propagation du VIH) sont aussi celles qui sont le moins susceptibles d'être atteintes par les modèles traditionnels de prévention de l'infection. Il propose une collaboration entre les spécialistes de la prévention de l'infection par le VIH et de la traite des personnes pour concevoir des initiatives qui réduisent le risque d'infection tout en aidant à identifier et à aider les victimes de la traite, formule appuyée par le groupe de travail interorganisations du gouvernement des États-Unis, le « Senior Policy Operating Group ».

Le département d'État finance aussi actuellement des recherches sur les victimes de la traite des personnes de sexe masculin, en se concentrant sur des études sectorielles qui permettront de guider les décisions de financement de programmes futurs. On trouvera des liens vers les diverses recherches financées par le gouvernement des États-Unis destinées à lutter contre la traite des personnes à http://www.state.gov/g/tip/.

Les catégories

Catégorie 1

Les pays dont le gouvernement respecte dans leur totalité les normes minimales de la TVPA pour l'élimination de la traite

Catégorie 2

Les pays dont le gouvernement ne satisfait pas pleinement aux normes minimales de la TVPA mais qui a fait des efforts importants pour se mettre en conformité avec ces normes

Catégorie 2 - liste de veille

Les pays dont le gouvernement ne satisfait pas pleinement aux normes minimales de la TVPA mais qui a fait des efforts importants pour se mettre en conformité avec ces normes ET :

a. - où le nombre absolu des victimes des pires formes de la traite est très élevé ou augmente sensiblement ; ou

b. - dont le gouvernement n'est pas en mesure de montrer qu'il a sensiblement renforcé ses mesures de lutte contre les pires formes de la traite par rapport à l'année précédente ; ou

c. - pour lesquels il a été décidé, sur la base d'engagements de prendre des mesures complémentaires au cours de l'année, que le gouvernement fait des efforts sensibles pour respecter les normes minimales.

Catégorie 3

Les pays dont le gouvernement ne respecte pas les normes minimales et ne fait pas d'efforts importants pour s'aligner sur elles.

Démocratie et traite des personnes

Comme nous l'avons déjà noté, notre évaluation de la performance des pays se fonde strictement sur les critères spécifiques relatifs à la traite énoncés dans la TVPA. Toutefois, notre large étude du phénomène de la traite des personnes corrobore le fait qu'un pluralisme démocratique sain et dynamique constitue la principale caractéristique commune des pays qui mènent des efforts efficaces de lutte contre ce phénomène. La démocratie active est le meilleur garant de la dignité humaine et du respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales de toutes les personnes, y compris les femmes, les enfants, les personnes prostituées et les migrants étrangers, qui figurent parmi les groupes de population les plus vulnérables à la traite.

Dans de nombreux pays, la déshabilitation de ce type de groupes permet à la traite des personnes de se développer et de prospérer parce que les victimes hésitent à se faire connaître pour demander protection et réparation en vertu de la loi.

Un indicateur clé de l'existence d'une démocratie vivante est l'existence d'un pouvoir judiciaire indépendant et de la primauté du droit. Dans le contexte de la traite des personnes, ces deux éléments permettent aux autorités de tenir les auteurs de ce crime pleinement responsables de leurs actes, notamment en leur imposant des sanctions qui reflètent la gravité de leurs agissements.

L'absence de corruption, ou au moins la présence de mesures officielles efficaces pour lutter contre la corruption, est l'une des composantes de la primauté du droit et elle revêt une importance primordiale dans la lutte contre la traite des personnes. Il arrive trop souvent que les victimes qui demandent la protection de la loi auprès de la police, des magistrats et des agents de l'immigration constatent que ceux qui devraient être leurs avocats contribuent en fait à leur dégradation.

Une société civile forte et indépendante, où les pouvoirs publics coopèrent avec le secteur associatif, est un autre élément contribuant à la santé de la démocratie qui constitue un instrument essentiel pour lutter de manière efficace contre la traite des personnes. Les ONG jouent un rôle particulièrement important dans de nombreux pays pour l'identification des victimes et l'apport de soutien à celles-ci. En revanche, dans certains pays, les pouvoirs publics font preuve d'ambivalence, voire d'hostilité, à l'égard des ONG et des autres acteurs de la société civile, ce qui fait parfois obstacle à l'identification des victimes, limitant ainsi l'efficacité de la lutte contre la traite des personnes. Étant donné l'ampleur et la portée mondiale de ce problème, la collaboration entre les autorités et les ONG est d'une importance vitale pour les efforts visant à éliminer les formes modernes de l'esclavage.

Si la démocratie ne garantit pas l'absence d'esclavage, et si certaines démocraties peu assurées ou même certains régimes autocratiques ont pu remporter des succès dans la lutte contre la traite des personnes, ces deux types de régimes, notamment les démocraties dites émergentes, sont moins bien équipés pour traiter des problèmes qui portent des atteintes gravissimes aux droits de l'homme. Le plein respect des droits de la personne, des libertés fondamentales et de la dignité des femmes, des personnes prostituées et des migrants, la traduction des trafiquants devant la justice où ils doivent répondre pleinement de leurs actes, et l'élimination de la corruption qui est un catalyseur de la traite des personnes relèvent de la bonne gouvernance. Un pouvoir judiciaire indépendant, la primauté du droit et une société civile dynamique sont, en particulier, les marques des régimes qui pratiquent une juste gouvernance ; ils sont essentiels à la réussite des efforts d'abolition de l'esclavage moderne.

Données mondiales sur l'application des lois

La Loi réautorisant la protection des victimes de la traite des personnes (TVPRA) de 2003 est venue ajouter à la loi qu'elle amende une nouvelle exigence en vertu de laquelle les gouvernements étrangers doivent fournir au département d'État des données sur les enquêtes, les poursuites, les condamnations et les peines relatives à la lutte contre la traite des personnes pour être considérés comme respectant pleinement les normes minima de la loi en vue de l'élimination de la traite (Catégorie 1). Le rapport de 2004 sur la traite des personnes a recueilli ces données pour la première fois et le rapport de 2007 innove en précisant le nombre de poursuites et de condamnations relatives au trafic de main-d'œuvre (indiqués entre parenthèses dans le tableau ci-dessous).

Année Poursuites  Condamnations    Nouvelle loi ou amendement

2003      7 992         2 815                 24

2004      6 885         3 025                 39

2005      6 178         4 379                40

2006      5 808         3 160                 21

2007        5 682 (490) 3 427 (326)                    28

Les chiffres donnés entre parenthèses sont ceux des poursuites et des condamnations relatives au trafic de main-d'œuvre.

(Fin du texte)

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